Des morts qui se promènent
Par-dessus tout, les Haïtiens possèdent le culte des morts qu’ils entourent d’attentions tendant à protéger les défunts contre les entreprises maléfiques des sorciers, qui pourraient tirer leurs corps du tombeau pour en faire, par vertu magique, des « zombi jardin », ou morts-vivants, et les obliger à travailler à leur profit. C’est pour cette raison que les tombes haïtiennes, dans les campagnes, sont en général de solides blocs de briques ou de ciment, sur lesquels veille l’effigie du Baron Samedi. Le Maître des cimetières est représenté par une tête humaine surmontant une croix de Saint-André. Parfois, cette effigie est gravée sur une haute croix latine qui, placée à l’entrée des cimetières, sert de reposoir au Baron. Des feuilles d’orme, arbre sur lequel règne le dieu, peuvent accompagner son image.
Pourtant, si les paysans haïtiens vénèrent les morts, ils les craignent bien plus encore. C’est pour cette raison que, avant de quitter la maison pour se rendre au cimetière, on fait accomplir plusieurs tours sur lui-même au cercueil. Ainsi, l’esprit du défunt ne pourra retrouver son chemin et venir tourmenter les vivants. Souvent, on place dans la bière un peigne, du savon, un chapelet, une pipe… Mais on n’a garde d’y mettre de l’alcool car, selon la croyance, le mort s’enivrerait et pourrait devenir agressif. Si on y mettait de l’argent, il s’empresserait de venir chercher les restes de la fortune familiale, et des épingles pourraient lui donner envie de venir piquer les vivants. Cette peur des revenants, ou « zombies » est telle que souvent, aux carrefours, de petites niches, entourant l’empreinte d’une croix, sont creusées à même la terre du talus. Ces niches contiennent des objets sacrés destinés à effaroucher les fantômes errants.
Mais ces superstitions ne doivent cependant pas être confondues avec le Vaudou. Elles ne font que l’entourer d’un cercle maléfique et contribuent encore à accentuer leur mystère.